Delphine Balley


“Les séries photographiques de Delphine Balley reconstituent et théâtralisent faits divers, scène familiales, scènes d’avant ou d’après crime, histoires vraies avec une extrême minutie, un goût prononcé pour le motif et le détail. Ces saynètes, métaphores du quotidien, sont autant de huis clos hors du temps qui mêlent savamment réalité et fantastique. La singularité créatrice de l’artiste transporte le spectateur dans un univers insolite, étrange, inquiétant, parfois dérangeant, mais toujours empreint d’humour et de dérision. Delphine Balley, armée de son appareil photographique, navigue entre la chronique, le journalisme, la narration, le conte ou encore le cinéma. De ses multiples influences (Vélasquez, Goya, Magritte, Ellroy, Giono, Kubrick), elle tire un regard particulier, reconstituant ainsi, par le truchement des cadrages, des lumières et des savantes mises en scène, des tableaux aussi classiques que novateurs.” Delphine Balley, née en 1974 à Romans, vit et travaille à Lyon. Diplômée l’École nationale de la Photographie, Arles, elle est rReprésentée par la galerie Suzanne Tarasieve, Paris.

  • Bio 

Née en 1974 à Romans (FRANCE)

  • Site du photographe 

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Portfolio

Aller au chagrin

Texte (c) Valérie Sourdieux

Travail réalisé dans le cadre d’une commande Bethune 2010.

Le travail s’articule autour de la mémoire de l’activité passée. Il s’agit davantage d’une allégorie centrée autour de la matière noire, souterraine qui remonterait à la surface, comme un souvenir enfoui qui ressurgit soudain. Les symboles sont les instruments de l’imaginaire qui offre à la réalité un point ancrage. Aller au chagrin, chargé d’un sens poétique et métaphorique est une manière d’investir la terre, les vestiges du passé. Il est question d’envisager la descente avant la remontée, ce qu’on va puiser dans les profondeurs afin de nourrir la surface. Evoquer la vie souterraine par le biais d’images, une part cachée mise en lumière. Ainsi, plusieurs pistes significatives ont été envisagées. Les images tentent de refléter cette part enfouie qui puise sa source dans une réalité objective. Une sorte de jeu entre le réel et l’imaginaire, le sens, signifié et signifiant, le visible et l’invisible, ce qui est caché et ce qui transparaît.

Théâtre de l'esprit

Texte (c) Valérie Sourdieux

Ce qui échappe au regard s’inscrit dans une autre forme de réalité, inconnue et parallèle. Delphine Balley observe depuis L’album de famille les différentes pièces de vie. Après les lieux habités et normés, elle ouvre la porte des espaces clos, inaccessibles et secrets, où l’intime est caché et protégé. Ce qui nous est donné à voir sont les traces d’une présence. Elle nous invite à visiter ces pièces désertées, représentatives de l’espace mental qui composent le théâtre de l’imaginaire et de l’inconnu. Comme les murs de la photographie Loirs à la tapisserie arrachée, la réalité est constituée de couches qui se mêlent à la fiction et propose une lecture nouvelle de ce que l’oeil peut percevoir. 

Ce qui intéresse précisément la photographe est cette part qui échappe, ce qui sort du champ de vision et des codes. Les lieux comme les êtres et les objets, se transforment et ce changement, signe de vie, prouve l’existence d’un univers tangible et autonome. Malgré cette coupure avec le réel, l’écoulement du temps se poursuit hors champ, symbolique que l’on retrouve dans la photographie Sel, où une clepsydre aurait été vidée sur le sol. Notre perception perturbée par l’absence des repères habituels force l’esprit à composer une histoire et poursuivre la transformation. Et c’est bien ce que nous propose Delphine Balley, se réapproprier des images dont la trame effacée et mystérieuse se prête au théâtre de l’esprit.

Le pays d'en bas

Les photographies du Pays d’en bas, chapitre 2 de L’album de famille, rendent compte d’un monde passé, laissé à l’abandon par ses habitants qui aurait pris la fuite. Des lieux habités par les objets laissés là, posés, subissant l’usure du temps, la moisissure. Le rituel est présent. C’est un pays où les femmes couvent les oeufs, font éclore les vers à soie dans la chaleur de leur corsage. Un pays où l’on apprend à devenir une jeune fille puis une femme. Un pays où les nuisibles (animaux) sont déposés dans les maisons pour devenir des signes, des messages. On se protège du malheur par des objets choisis. Ses lieux vides sont comme les décors d’une vie passée.